La transmission de l'entreprise...
- pchardin
- 20 mars 2014
- 4 min de lecture
La transmission de son entreprise est pour un entrepreneur un moment important de sa vie, non seulement sous un angle purement affectif, mais aussi dans ses implications familiales et patrimoniales. Aussi est-il très réducteur de considérer que la seule problématique d’une transmission d’entreprise, hormis bien entendu l’aboutissement des négociations sur le prix et les modalités juridiques de l’opération, est fiscale et peut se résumer très simplement : « Comment éviter le paiement des plus values de cession ? ».
Que d’erreurs patrimoniales majeures sont commises au nom de ce « sacro-saint » principe! De la création de holdings suicidaires à des transmissions à titre gratuit assorties de l’indémodable démembrement de propriété! Ainsi donc si la transmission d’une entreprise ne peut pas et ne doit pas se déconnecter de l’environnement familial et patrimonial du cédant, faut-il encore que ce dernier dispose d’une vision globale de son patrimoine au travers d’un audit qui à partir des éléments de fait (l’âge, la situation familiale, la composition du patrimoine privé, etc) dresse des constats, soulève des problématiques qui permettront la mise en place de stratégies appropriées.
Notre propos d’aujourd’hui est d’illustrer par deux exemples l’importance que doit prendre dans l’esprit d’un entrepreneur la réalisation et le suivi dans le temps et depuis la création de son entreprise, de l’audit de sa situation patrimoniale globale : - Composante familiale, professionnelle et privée
- Audit dont les conclusions permettront un enrichissement global du patrimoine durant la période d’activité, et qui s’avèreront décisives au moment d’effectuer des choix pertinents quant à l’organisation de la transmission de son entreprise.
1er exemple : Analyse de la situation familiale et plus particulièrement du régime matrimonial de l’entrepreneur. Il est courant (et conseillé) qu’un entrepreneur ait au moment de son union contracté sous le régime de la séparation de biens, et qu’à l’occasion de ce contrat ou postérieurement ait satisfait naturellement à la protection de son conjoint en lui consentant une donation au dernier vivant. C’était il y a 25 ans à la création de l’entreprise et cette situation matrimoniale ne s’est pas modifiée depuis. L’analyse de la situation patrimoniale du couple permet de constater, et c’est juridiquement logique, que le conjoint-entrepreneur possède la presque totalité du patrimoine du couple.
Si au moment de céder l’entreprise ce constat n’est pas effectué, il n’apparaîtra pas forcément comme nécessaire d’envisager avant la cession une libéralité au profit du conjoint qui permettrait de rééquilibrer les masses patrimoniales de chacun des époux.
Ce rééquilibrage est essentiel à ce moment là : il permet d’éviter que la protection du conjoint survivant ne soit assurée que par un usufruit total sur l’actif successoral (ce qui bloque le patrimoine et donc l’enrichissement du groupe familial), il permet par ailleurs d’optimiser la transmission à titre gratuit aux enfants et il permet enfin accessoirement d’éviter une partie des plus-values de cession. Mais depuis peu, les libéralités faites aux conjoints sont irrévocables (en dehors du cas des donations pour cause de mort de biens à venir) : aussi cette solution n’est-elle envisageable que si le couple est suffisamment « uni » et si bien entendu elle est expliquée dans toutes ses conséquences au moment de sa présentation!
2ème exemple : Analyse du patrimoine professionnel et présence d’un immobilier d’entreprise positionné comme il est logique en début d’activité dans le patrimoine « privé » au travers d’une Société Civile Immobilière.
Tous les entrepreneurs et leurs conseils savent la pénalisation fiscale que constituent le paiement de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux sur des loyers perçus par la Société Civile Immobilière (mais pas forcément encaissés par les associés en période de financement) et l’avantage fiscal que représente l’exonération des plus values de cession si cette dernière intervient plus de 22 années après la date d’acquisition du bien ou des titres.
Ce « problème » de l’immobilier d’entreprise doit s’analyser en tenant compte de plusieurs paramètres qui ressortent de l’analyse globale effectuée au travers de l’audit :
1°) Incidence de la situation familiale : le repreneur potentiel de l’entreprise est-il un enfant ?Si oui, a t’il des frères et sœurs? Si oui, il conviendra de respecter l’égalité entre les enfants et pour ce faire d’avoir audité le patrimoine privé pour mesurer la possibilité de constituer des lots si éventuellement l’opération de transfert pourrait s’effectuer à titre gratuit mais: 2°) Incidence budgétaire : le cédant chef d’entreprise a t’il les moyens de transmettre à titre gratuit ?Si non, après une projection de son budget, doit-il garder des revenus fonciers imposables alors qu’il ressort des constats effectués que la perception de ses retraites le positionne déjà dans les tranches les plus hautes de l’impôt sur le revenu. Ce qui nécessiterait donc une opération de transfert à titre onéreux, de façon à reconstituer des revenus complémentaires moins fortement fiscalisés que des revenus fonciers…. 3°) Dès lors: Pour éviter la fiscalisation des revenus fonciers, n’est-il pas envisageable quelques temps avant la cession de l’entreprise que cette dernière devienne propriétaire de son immobilier ? La complexité des analyses et des constats vient du fait que compte tenu de la multiplicité des données chaque cas est un cas particulier.
Une étude non exhaustive pourrait faire que les solutions et les raisonnements énoncés dans les deux exemples ci-dessus soient illogiques et conduisent à des appauvrissements du patrimoine de la famille. Il convient que l’analyse patrimoniale globale au travers d’un audit soit menée de façon rigoureuse.

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